Abbaye de Marnans, entre histoire et légende.
Je ne suis pas historien, mais devant le peu de données fournies par internet sur ce patrimoine local, je me décide à prendre la plume afin de partager quelques informations sur l'Abbaye de Marnans devant laquelle je passe souvent en promenade.
L'ouvrage de référence en ce qui concerne l'histoire et l'architecture est :
« Patrimoine en Isère Chambaran »
Collection « Archéologie chez nous »
Edité par le Musée Dauphinois.
Conservation du Patrimoine de l'Isère
30, rue Maurice-Gignoux
38001 Grenoble Juin 1999
Pages 75-77
Quelques dates
Avant 1070 date de la mort de l'archevêque de Vienne Léger, une donation par une dame Elisabeth et ses fils à l'abbaye de St André le Bas (Viennois).
23 mai 1157 : une bulle du pape Adrien IV cite comme possession de St André le Bas « l'église de Marnans ».
1193 une charte de la Chartreuse des Ecouges (Vercors) signale la présence de chanoines à Marnans.
1287 après de nombreux conflits entre Antonins et Bénédictins de Montmajour, l'abbaye de Marnans est rattachée aux Antonins dont la règle est celle des Hospitaliers de Saint Antoine l'Abbaye.
1562 ou 1567, durant les guerres dites de « religion », le baron des Adrets détruit le cloître et incendie l'église.
C'est là que naît la « Légende de Marnans ».
Fin du XVIe siècle, la fonction paroissiale semble être établie bien que ce ne soit qu'en 1802 au Concordat que l'église St Pierre de Marnans prends son statut paroissial.
De 1979 à 1982 des fouilles sont réalisées.
Architecture.
Le plan et l'orientation sont de facture cistersienne.
Simplicité des lignes, sobriété du décor lui confèrent son austérité manifeste lorsqu'on est dans la nef vide de toute ornementation et mobilier.
Les abbayes du Thoronet dans le Var et l'église de Léoncel dans le Vercors proche lui ressemblent.
L'orientation est Est-Ouest.
Est d'où vient la lumière, le lever de soleil, l'orient.
Ouest l'entrée à l'occident (occidere-tomber-tuer) où le soleil se couche et comme à Marnans souvent où se trouve le cimetière.
Autour du porche d'entrée, il est à noter une particularité rare.
Deux colonnettes différentes dont l'une à gauche octogonale ,est celle du Maître et l'autre à droite cylindrique est celle de l'Apprenti.
Cette singularité me permet de citer Dan Brown dans le « Da Vinci code » où il fait allusion au caractère maçonnique de ce travail faisant référence au lien entre le maître et l'apprenti :
« Yakin « Il établira » et Boaz « en lui la force »
citées dans la Bible hébraïque comme étant les deux colonnes de bronze à l'entrée du Temple de Salomon à Jérusalem.
« Langdon contempla les deux colonnes ouvragées, tout au bout du sanctuaire. Alors que celle de gauche était striée de simples lignes verticales, celle de droite, beaucoup plus chargée, était enguirlandée sur toute sa hauteur d’une curieuse spirale de pierre aux motifs floraux délicatement ciselés.…….
- Des copies de Rosslyn ? dit Sophie.
- Non, des piliers. Comme je vous l’ai expliqué en voiture, la chapelle de Rosslyn est une réplique du temple de Salomon de Jérusalem, et ces deux piliers sont identiques à ceux qui en encadraient l’entrée.
Celui de gauche, c’est « Boaz », le pilier du maître ; et celui de droite, c’est « Jachin », le pilier de l’apprenti. On les retrouve dans presque tous les temples maçonniques. »
Da Vinci Code page 547 édition JC Lattès Dan Brown
Autres particularités, la voûte en cul-de-four au-dessus du choeur.
Au dessus de l'arc triomphal ouvrant sur l'abside une ouverture en baie cruciforme semblable à celle de l'abbatiale de Saint-Chef.
C'est de tête que je vous raconte la « Légende de Marnans ».
En travaillant comme infirmier à l'hôpital de Roybon, j'ai souvent eu des anciens de Marnans venus y passer soit quelques jours de convalescence, soit y finir leurs jours.
Ce récit de «la Légende de Marnans" est celui d'une vieille dame du village...drame ou tragédie, les deux ?
... Ensuite, j'ai entendu différentes versions, mais il me semble plus respectueux de l'histoire de vous envoyer lire la « Chronique Dauphinoise » de Vital Berthin paru dans la « Revue de Vienne » en 1839 recueillie par le Père A.Luyat, curé de La-Côte-St-André.
Page 210 du document ci-dessous.
"La Légende de Marnans"
"Lors des guerres de religion, le Dauphiné était à feu et à sang. Le baron des Adrets défendant la cause protestante se fait une mauvaise réputation, il sème la terreur.
En 1562 à la tête de 400 cavaliers , il se dirige de Viriville à Marnans. Son projet : détruire l'église et le prieuré...et capturer son prieur !...»
L'Histoire rejoint le drame personnel, il est question d'amour, de retrouvailles et de regrets sinon de remords.
Il est question d'un mystère et d'un médaillon.
La camarde hante les lieux en ces temps troublés.
Pour en savoir plus, allez lire (lien google-books ci-dessous) à la source le récit de Vital Berthin. Il laisse sa voiture en 1839, une voiture à cheval pour continuer à pied de Viriville jusqu'à Marnans le long de la Peyrouse.
On y trouve aussi page 207 l'explication des inscriptions mystérieuses sur les pierres au sud de la nef et derrière le choeur à l'Est.
Ce sont des « obits » des inscriptions obituaires de la fin du XIIe siècle, ces pierres portent les noms soit des prieurs et religieux pour l'Est soit des donateurs et bienfaiteurs du prieuré au Sud.
On dit que c'est suite à cet événement qu'il rejoint les rangs catholiques où il fait malheureusement preuve d'autant de cruauté et d'intolérance.
"Chronique Dauphinoise" de Vital Berthin dans la Revue de Vienne 1839. La légende de Marnans page 210