Blanche Neige et les sept Marmottes.
Tout l’été passé
A se prélasser
Dans les prés.
Sept Marmottes
Ne furent pas prises au dépourvu
Quand la neige fut venue.
Prof debout le doigt pointé vers le ciel les avait prévenues que cet hiver serait rude et viendrait tôt. Chacune occupée vaquaient guillerette selon leurs penchants à des occupations de saison et des siestes qui ne l’étaient pas moins.
Joyeuse jouait des tours aux vacanciers, cachée sous les voitures au
parking. Ils repartaient insouciants sans se rendre compte des trous en forme de sifflets creusés dans leur pot d’échappement. C’est sur des airs de tyrolienne qu’ils traversaient les villes
avant de se faire verbaliser par un agent de police sans humour, au pied si peu montagnard.
Atchoum se tient loin du monde. On lui a rabâché qu’il faut éternuer
dans son coude à cause de la grippe, mais ce n’est pas possible avec ses pattes courtes. De toutes façons, la grippe n’est pas pour les Marmottes. Annie la Marmotte , la référence dans la science marmotte vous le confirmera.
Holà ! Photographe, ne t’approche pas…….a…aaa…..aaa….atchoum !
Dormeuse ne risque rien, la neige peut bien venir, elle est déjà dans
le fond de son terrier. Marcheur fait attention, tes pieds chaussés avec tes gros souliers font comme un tremblement de terre quand tu arrives. Charentaises ou tongs sont de mise proche de chez
Dormeuse, la robe de chambre de pilou est au clou, alors de la discrétion et de la pudeur.
Grincheuse ne me regarde pas, les beaux discours de prof lui font tourner le dos, de toute façon, la neige nous permettra d’être enfin tranquilles. Où se croît ils tous ces touristes ? On
n’est pas sur Sunset Boulevard ici. Avez-vous vu les empreintes de mes pattes dans le béton du trottoir ?
Alors passe ton chemin paparasite.
Timide me fait un clin d’œil de loin, ça lui plairait de faire la une des magasines, mais hélas, il faut parler aux gens, faire des simagrées devant l’objectif, mettre sa griffe sur des livres de
mensonges. Je t’interdis de publier mon portrait sur le net. Et surtout pas sur Facebook, j’ai autre chose à faire que de répondre à toutes ces balivernes et faire ces jeux pour enfants attardés,
dignes d’un après-midi d’animation à la maison de retraite du village. Où alors je veux bien mais de dos, cachée par une herbe, avec des lunettes de soleil sous un grand chapeau. Dit :
« tu m’enverras la première page ? »
Toi au moins tu t’approches, toujours fourrée près des hommes. Tu
portes bien ton nom de Simplette, tu ne peux pas imaginer ce que les hommes font aux Marmottes. Les baleines c’est rien à comparer, et pourtant le WWF ne nous a pas inscrites dans la liste des
animaux menacés. Ne soit pas si naïve, ils en font des médicaments pour les rhumatismes de ta précieuse graisse , des ragoûts succulents de tes abattis rondelets, des manteaux chauds pour l’hiver
des poils soyeux dont tu es si fière. Que sais-je encore ?
Ils nous tournent en ridicules affublées de toutes sortes de colifichets, d’attributs vestimentaires, parures, couvre-chefs, accessoires de théâtre, emblèmes, logos. Si tu les voyais rire à nos dépends, se taper sur le ventre, se rouler par terre sans compassion devant nos allures de singe savant. Nous ne sommes pas des enseignes publicitaires. Ils nous prêtent toutes sortent de sentiments et de manières. Ils appellent cela « l’anthropomorphisme », comme s’ils étaient le centre du monde, le Dieu-Homme qui a fait soit disant la Marmotte a son image. Laissons cela pour les enfants, il est temps de s’émanciper. Vive le FLM, le Front de Libération de la Marmotte. On verra ça en juin prochain d’accord ?
Tout a commencé par
quelques jours bien froids, plus courts. Le torrent ne chantait plus, une couche de glace scellait son murmure argentin. Chamois, mouflons et bouquetins sont descendus plus bas vers la forêt.
Seul un renard efflanqué et peu intrépide est venu rodé autour des
terriers. Les jours de soleil se faisant de plus en plus rare, nous sommes restées à l’abri de nos terriers capitonnés d’herbes odorantes de la pelouse alpine. D’ailleurs nos kilos ne sont pas
superflus, finies les petites courses pour aller voir la voisine, jamais nous n’avons été aussi fières d’avoir des bourrelets pour l’hiver. De temps en temps un petit voile de rosée blanche, une
petite neige en cristaux scintillants nous surprenaient le matin . Mais un jour la nuit s’est faite dans le terrier, une lumière diaphane parvenait à grand peine sur le seuil, alors nous
avons compris que Blanche-Neige était venue.
Si seulement les hommes connaissaient toutes nos ressources en matière d’économie d’énergie. Isolation de l’habitat, thermorégulation, adaptation au milieu. Le pouls lent, la respiration
imperceptible, un fluidifiant dans nos veines, des reins en fonctionnement minimum sous contrôle hormonal pour ne pas avoir à se lever la nuit, nos corps se sont assoupis pour de longs mois dans
la paix du grand silence blanc.