Etrennes et histoire de couteaux, Thiers.
Les Savoyards et les Suisses ne m'en voudront pas trop de cette infidélité en parlant de Thiers dans le Massif-Central.
Le mois de janvier est celui des « étrennes » .
De nos jours on offre de l'argent mais par le passé c'était parfois un objet.
A l'occasion des « Fêtes », je me souviens que mon père au grès de visites à ses clients et amis distribuait des couteaux dit « suisses » je dis bien « distribuait » car il me disait :
« Ne donne jamais un couteau, ça coupe l'amitié. »
D'ailleurs dans la famille depuis longtemps il n'y a jamais eu de couteaux dans les listes de mariage.
«Donne moi, 1 sou, 1 centime ou 1 franc, j'ai quelque chose à te vendre »
...disait-il à son client et en échange d'une pièce il « vendait » son couteau de promotion.
De la réclame, le canif, couteau pliant, couteau de poche se prête bien à être un support publicitaire.
Les pays de montagne ont développé de petites industries grâce à la proximité du minerais, de la force hydraulique mais aussi des longs hivers qui obligeaient les gens à travailler à l'intérieur.
Schwytz pour le Victorinox, Saint Jean de Maurienne pour l'Opinel, Laguiole dans le Cantal.
Dans les cours d'histoire géographie, si on retenait une chose sur Thiers c'était la coutellerie, comme la tapisserie d'Aubusson, la porcelaine de Limoges, le mouchoir de Cholet, l'horlogerie de Besançon, le nougat de Montélimar, la saucisse de Toulouse, la dentelle du Puy ou de Calais et la sardine du port de Marseille...
La ville de Thiers peut paraître austère à première vue, touchée par la crise, et la transformation de l'économie mondiale, de lourds bâtiments industriels dans le Creux de l'Enfer sont à l'abandon.
Il faut aller dans le centre historique de la ville et parcourir à pied la rue de la Coutellerie voir les maisons à encorbellement et colombage pour capter l'esprit de la vieille tradition coutelière de la ville.
Avertissement : prévoir une bonne journée en commençant le matin pour visiter l'ensemble du site sur trois lieux.
Deux bâtiments dans le centre historique, montre une histoire de la coutellerie depuis 600 ans ainsi qu'un atelier où en sous-sol est reconstituée l'ambiance « infernale » des forges, avec les forges, les presses à emboutir où la recommandation du contremaître était :
« Compte tes doigts avant de commencer le travail. »
Nous assistons à la création du couteau pliant de Thiers, avec toutes les étapes de sa fabrication (voir la vidéo plus bas).
Les étages sont un musée où une collection impressionnante de pièces rares sont exposées ainsi que le quotidien ouvrier, ses luttes au cours de l'histoire.
Amateur de randonnée nous terminons cette découverte par la Vallée des Rouets.
A 10 minutes à l'Est de Thiers, on rejoint Château-Gaillard par la D2089 en direction de Lyon.
Un point d'information permet de se procurer un plan de la visite.
Deux boucles : 30 minutes pour le Circuit des Rouets Fourniot
et 1 heure pour le Circuit de la Colline des Boules.
« Le rouet est un petit atelier ou moulin à aiguiser actionné par une roue hydraulique. C'est un bâtiment à 2 niveaux, en granit brut ou taillé, couvert de tuiles romanes. La façade est percée de larges baies vitrées qui assurent un éclairage maximal. »
C'est ainsi que le guide décrit le lieu de travail des émouleurs.
Une rivière, la Durolle en fournit l'énergie par les roues à aubes, courroies et engrenages pour faire tourner les meules à aiguiser.
Les ouvriers travaillaient allongés sur une planche souvent avec un chien couché sur leurs mollets.
Ce sont près de 600 ouvriers qui arpentaient les sentiers pour aller travailler au fond des gorges dans les ateliers et ceci au début du XXe siècle jusqu'aux années 30 où l'arrivée de l'électricité et de systèmes mécaniques plus élaborés leur ont permis de pratiquer leurs activités dans des ateliers modernes.
Alors pour les Fêtes comme étrennes, ne donnez pas de couteaux, ça coupe l'amitié : « Vendez le ».
Vidéo officielle , laissez vous emportez par la magie.