L’idiot du Voyage , J.D.Urbain.
Sous titre : « Histoires de touristes » à la Petite Bibliothèque Payot (2007).
Je ne suis pas un touriste vous insurgez vous comme moi quand on m’a offert ce livre, je suis un voyageur, un aventurier, un ethnologue (a)mateur ! Phileas Fogg ou Robinson Crusoé, avec dans la poche « Voyages avec un âne dans les Cévennes ». Washington Irving dans l’Alhambra délabrée, P.E.Victor en herbe dans un kayak sur les côtes de l’Île d’Elseneur, l’Orient Express sans Agatha mais sur la même banquette que la Madone des sleepings, je suis certain que vous y trouverez votre conte. Conte ? Oui vous avez bien lu, car pour citer avec l’auteur les philosophes :
« Il y a dans le roman une aspiration à saisir ou décrire la vie ; on l’appelle le réalisme ; il y a dans la vie une aspiration à la littérature, un désir d’accéder à l’intensité d’une fiction, de ressembler à un roman : on l’appelle l’aventure. »
P.Bruckner et A.Finkielkraut (Au coin de la rue, l’aventure)
A moins que les affiches de TramTram du métro vous allèchent pour des destinations du genre Club Adriatique ou Antiques Limites.
A pied, à cheval, en voiture vous saurez enfin quel voyageur, aventurier vous êtes quand vous prenez le train, l’avion pour une villégiature, un Tour, un séjour, un circuit et même une randonnée, un raid, en étoile ou en rond.
C’est avec beaucoup d’humour sans moins de sérieuses références que Jean-Didier Urbain fait le point sur cette pratique de nos sociétés.
Ceux qui croient s’en tirer avec un pèlerinage, que ce soit à Verdun, Compostelle, les sources du Gange, un safari dans un désert ou une forêt tropicale, une traversée du détroit de Béring en planche à voile ne seront pas épargnés non plus. Je ne pense pas que les voyageurs solidaires au Congo ou au Sri Lanka s’en tirent mieux.
Digne successeur des Chateaubriand, Lord Byron, H de Monfreid, Stevenson et pourquoi pas A.Gerbault sur les ruines du Parthénon, du temple d’Angkor à Chichèn Itzá , de Bora Bora à la Baie des Anges en compagnie d’un russe blanc, déguisé en indien d’Amazonie, aux coté d’une grosse cylindrée, une bécane de baroudeur, le René Caillé qui sommeille en vous et qui pense passer incognito sera de suite démasqué. C’est sans complaisance que l’auteur dresse une histoire, que dis-je une anthologie des vacances et du voyage.
Alors : prêts ? Préparez vos valises ou votre sac à dos, on dort ce soir à la belle étoile. Le navire tangue, le poster sur le mur de la chambre agite ses palmes, les crampons et la corde sont gelés devant le refuge d’altitude, la natte de raphia vole au vent des tropiques ; vous avez oublié votre casquette customisée au logo de la compagnie aérienne peu importe, il y en a pour tous les goûts. Ce n’est même pas la peine d’enlever vos ray ban, ni de rouler votre turban, il vous a reconnu. Ouvrir ce livre c’est comme se regarder dans un miroir qui parfois éventuellement pourrait être magique. L’idiot du voyage c’est moi aussi. Vieux, Pierre Loti ou Tartarin sur un sofa « made in china » entre une estampe « Japoniaise » et un narguilé de pacotille chiné dans une brocante locale, sous mon poncho bariolé, je suis étranger à ma propre demeure avec un livre d’Alexandra David-Neel entre les mains ou le « Tourista » de Claire Bretecher (qu’il vaut mieux avoir en BD qu’aux WC) à méditer sur cette dernière citation de J.D.Urbain :
« Cette idée d’aller dans le tiers monde alors que le quart monde est à sept stations de métro. »
C.Bretecher, »Tourista.